Le Knowledge Graph de Google n’est plus seulement un outil d’enrichissement des résultats de recherche. Il est devenu l’épine dorsale des systèmes d’intelligence artificielle comme Gemini et AI Overviews. Comprendre comment les entités sont identifiées, validées, classées et utilisées par Google est désormais indispensable pour les professionnels du SEO qui veulent rester visibles dans les SERPs de demain.
Pour creuser le sujet, on s'est appuyé sur le travail de Damien Andell de 1492.vision et Olivier de Segonzac de RESONEO, à qui l’on doit également la mise en évidence des 400 événements trackés par Google sur ses pages de résultats. Plongée dans les coulisses d’un système d’une complexité fascinante… et d’une efficacité redoutable !
Ce qu'il faut retenir :
- Google alimente ses IA avec des entités structurées et validées par triangulation (3 sources indépendantes minimum).
- Le Knowledge Graph est mis à jour en continu, même avec des entités encore non validées.
- S’ancrer dans le KG, c’est devenir visible dans les résultats enrichis, les réponses d’assistant et les modules IA.
- Mentions dans des sources fiables + structure de contenu autour des entités = stratégie SEO gagnante à long terme.
Un écosystème d’entités, bien plus vaste que Discover
Dans l’univers Google, tout est entité. Une entreprise, une personne, un film, un restaurant ou un ingrédient de recette : tout ce qui peut être nommé, relié, enrichi et validé devient une brique du Knowledge Graph (KG). Contrairement à la vision réductrice qui limiterait son rôle à Google Discover, le KG est aujourd’hui au cœur de toute l’architecture IA de Google : il alimente les Knowledge Panels, les réponses d’assistants vocaux, les extraits optimisés (featured snippets), et surtout les nouveaux dispositifs basés sur Gemini 2.0, comme AI Mode et AI Overviews.
Une machine d’extraction continue
Le pipeline d’extraction de Google est un chef-d’œuvre d’ingénierie. Tout commence par des pages web de haute topicalité : Wikipédia, sites officiels, bases de données publiques comme la SEC, ou encore IMDB pour les contenus culturels. À cela s’ajoutent des sources secondaires à topicalité modérée (blogs, presse, rapports sectoriels), qui permettent de détecter les entités « longue traîne ».
Des systèmes d’extraction spécialisés (SAFT, Tractzor, Chain Mining) analysent ces contenus pour repérer plusieurs entités en même temps. Chaque page peut enrichir plusieurs entités simultanément, une page listant « les 10 meilleurs restaurants parisiens » permet d’enrichir 10 entités restaurant. L’information extraite est ensuite notée selon sa fiabilité et sa pertinence, en particulier via des scores de « singleTopicness ».
Résolution, annotation, désambiguïsation
Une fois les entités repérées, elles sont annotées automatiquement grâce à des systèmes comme WebRef/QRef. Un système de reconnaissance d’entités nommées (REN) identifie les bons sens des mots, « Apple » sera relié à Apple Inc. et non au fruit, grâce à l’analyse du contexte. C’est là qu’interviennent les « Types de Valeurs Complexes » (CVT) qui permettent de créer des relations riches : mariages, parcours scolaires, postes occupés…
Surtout, chaque entité est résolue à travers plusieurs identifiants : Freebase MID, Gaia ID, Oyster ID, Cluster ID, etc. Une seule entité peut avoir plusieurs ID, mais ils sont consolidés en un cluster unifié, indispensable pour garantir la cohérence de l’ensemble du graphe.
Le moteur Livegraph : validation par triangulation
La validation des faits repose sur une triangulation stricte : un fait n’est intégré dans le KG que s’il est confirmé par au moins trois sources distinctes (ex. : page web de référence, article de presse, base officielle). Ce processus est automatisé, mais aussi soumis à une gouvernance humaine. En cas de doute, les curateurs humains interviennent pour trancher, valider ou rejeter certaines données.
C’est aussi à ce niveau que les fameuses « données faibles » sont intégrées avec prudence : testées sans être utilisées comme source principale dans le cas de conflit. Cela montre l’extrême rigueur de Google dans la sélection de l’information, bien loin de la simple indexation brute du web.
Entités non ancrées : Google comble les trous
Contrairement à des modèles statiques comme ChatGPT, Google gère aussi les entités « non ancrées », celles qui n’ont pas encore d’identifiant dans le KG. Elles sont stockées temporairement dans une zone tampon et peuvent être utilisées dans les réponses IA tant qu’elles sont pertinentes. Cette flexibilité permet à Google de couvrir en quasi-temps réel des événements récents ou des entités émergentes. Un avantage stratégique majeur.
Collections, catégories et hiérarchie des sources
Une entité est rarement seule : elle appartient à des collections (ex. : /collection/actors pour Tom Cruise), des catégories hyper-fiables (restaurant, entreprise locale, personne publique) et des namespaces selon leur origine :
- kc: → données issues de corpus validés (ex. âge officiel)
- ss: → extraits structurés issus du web
- hw: → données curées manuellement
Cette hiérarchie se reflète directement dans les résultats de recherche, y compris dans les Knowledge Panels, avec une attribution claire des sources.
Un avantage IA décisif
Avec la montée en puissance de Gemini, Google utilise son Knowledge Graph comme base factuelle fiable. Les réponses générées par AI Mode s’appuient sur ces entités, avec leur historique, leurs relations et leur validation multiple, ce qui donne à Google un net avantage face aux LLMs classiques. Là où ChatGPT ou Claude doivent « récupérer » de l’info à travers le RAG, Google l’a déjà intégrée, vérifiée et structurée.
Ce niveau de sophistication redéfinit la manière dont les données structurées influencent la visibilité. Pour les SEO, cela signifie qu’il ne suffit plus de viser des mots-clés. Il faut désormais devenir une entité, être cité dans des sources fiables, construire un corpus de signaux autour de soi, et comprendre la logique d’infrastructure derrière les réponses IA. C’est la condition sine qua non pour apparaître dans les modules avancés qui remplacent progressivement la liste de liens traditionnelle !