Le juge fédéral Amit Mehta a statué que Google avait violé la loi antitrust en maintenant illégalement son monopole sur les marchés des services de recherche et de la publicité. Cette décision pourrait bouleverser l'industrie numérique et influencer d'autres géants de la tech.

Ce qu'il faut retenir :

  • Google est reconnu coupable de pratiques monopolistiques par un juge fédéral.
  • Des accords exclusifs avec Apple et Android sont au cœur de la violation antitrust.
  • Les implications potentielles incluent des changements majeurs dans les opérations de recherche de Google.
  • Google prévoit de faire appel, prolongeant ainsi la bataille juridique.

Google reconnu coupable de monopole

La décision du tribunal fédéral marque un tournant majeur dans la lutte contre les monopoles technologiques. Le juge Amit Mehta a conclu que Google avait illégalement maintenu son monopole sur les marchés des services de recherche et de la publicité en ligne, en violation de la Section 2 du Sherman Act : “Google est un monopole et a agi comme tel pour maintenir son monopole”. Si vous avez le courage, vous pouvez lire son dossier de 286 pages. Sinon, continuez à lire cet article !

Les détails de la décision

La Cour estime que : 

  • il existe des marchés de produits pertinents pour les services de recherche générale et les annonces textuelles de recherche générale
  • Google a un pouvoir de monopole sur ces marchés
  • les accords de distribution de Google sont exclusifs et ont des effets anticoncurrentiels
  • Google n'a pas fourni de justifications proconcurrentielles valables pour ces accords.
  • Google a exercé son pouvoir de monopole en facturant des prix supraconcurrentiels pour les annonces textuelles de recherche générale. Ce comportement a permis à Google de réaliser des bénéfices de monopole.

D'autres décisions sont cependant en faveur de Google. Le tribunal estime que : 

  • il existe un marché de produits pour la publicité par recherche, mais que Google n'a pas de pouvoir de monopole sur ce marché
  • il n'existe pas de marché de produits pour la publicité par recherche générale
  • Google n'est pas responsable de ses actions impliquant sa plateforme publicitaire, SA360. 
  • Le tribunal refuse également de sanctionner Google en vertu de la règle 37(e) de procédure civile fédérale pour son manquement à conserver les messages de chat de ses employés.

L'importance des accords de distribution

Le juge Mehta a constaté que Google avait abusé de sa position dominante en concluant des accords exclusifs avec des entreprises comme Apple et Samsung. Google a payé des milliards de dollars pour s'assurer que son moteur de recherche soit préchargé par défaut sur les smartphones et les navigateurs, garantissant ainsi une part de marché quasi inattaquable. En 2022, Google a versé 20 milliards de dollars à Apple pour maintenir ce statut de recherche par défaut sur les appareils iOS.

Dans sa décision, le juge déclare : “Google a également un avantage majeur, largement invisible, sur ses rivaux : la distribution par défaut. La plupart des utilisateurs accèdent à un moteur de recherche général via un navigateur (comme Safari d'Apple) ou un widget de recherche préchargé sur un appareil mobile. Ces points d'accès à la recherche sont prédéfinis avec un moteur de recherche “par défaut”. Le moteur par défaut est un bien immobilier extrêmement précieux. Comme de nombreux utilisateurs s'en tiennent simplement à la recherche par défaut, Google reçoit des milliards de requêtes chaque jour via ces points d'accès. Google tire des volumes extraordinaires de données utilisateurs de ces recherches. Il utilise ensuite ces informations pour améliorer la qualité de la recherche. Google accorde tellement d'importance à ces données qu'en l'absence de modification initiée par l'utilisateur, il stocke l'équivalent de 18 mois d'historique de recherche et d'activité d'un utilisateur.” 

Et pas de place pour les concurrents, puisque les partenaires de Google acceptent également de ne pas précharger d’autres moteurs de recherche sur l’appareil. La plupart des appareils aux Etats-Unis sont exclusivement préchargés avec Google.

Défense de Google

Google a immédiatement contesté la décision, déclarant que la firme allait faire appel. Kent Walker, président des affaires mondiales chez Google, a déclaré sur X : “Cette décision reconnaît que Google offre le meilleur moteur de recherche, mais conclut que nous ne devrions pas le rendre facilement accessible. Nous prévoyons de faire appel.” 

Google affirme que sa domination du marché est due à la qualité supérieure de ses produits, et non à des pratiques anticoncurrentielles.

Le futur des réglementations antitrust

Cette décision marque une victoire pour le département de la Justice et pourrait influencer d'autres affaires en cours contre des géants technologiques comme Amazon, Apple, et Meta. Elle pourrait redéfinir l'application des lois antitrust centenaires aux marchés numériques modernes. Les solutions potentielles à cette violation pourraient inclure des changements drastiques dans les opérations de Google, voire une possible scission de certaines de ses activités.

Prochaines étapes

La bataille juridique est loin d'être terminée. Le juge Mehta doit encore déterminer les mesures correctives à imposer à Google. La décision finale pourrait prendre des années, rappelant le long combat juridique des années 1990 contre Microsoft.

En attendant, Google doit également se préparer pour un nouveau procès antitrust prévu le 9 septembre, concernant ses activités dans la publicité numérique. Ce procès, intenté par le DOJ en Virginie, allègue une monopolisation illégale du marché des annonces numériques par Google.