Difficile de passer à côté de cette info depuis le vendredi 1er février 2008 : Microsoft a fait, dans un premier temps, une offre de rachat de Yahoo! pour 44,6 milliards de $. Annonce qui a généré un tsunami à l'échelle du Web, même si cela n'était pas si surprenant, beaucoup d'observateurs s'attendait à cette proposition depuis de nombreux mois...
Le site Abondance ne titrait-il pas Une alliance Microsoft-Yahoo! pour contrer Google ? dès le mois de mai 2006, soit il y a près de deux ans de cela... La même rumeur revenait rôder au mois de mai 2007... Etc. Tout cela était donc latent...
Une volonté de rachat à rapprocher de la volonté de Microsoft d'obtenir 30% du marché des moteurs de recherche et 40% de celui de la publicité d'ici cinq ans, une velléité impossible à réaliser en l'état actuel des choses sans un rachat de ce type... L'acquisition récente de Fast va également dans ce sens.
Le constat de cette OPA de Microsoft sur Yahoo! est rude pour les acteurs de la recherche d'information sur le Web :
- Aujourd'hui, même des "mastodontes" comme Yahoo! et Microsoft n'ont pas pu, ou su, endiguer le "monstre Google" et lui prendre des parts de trafic conséquentes, notamment en Europe. Pour Microsoft, cette transaction est avant tout un constat d'échec pour ses projets en termes de technologies internalisées de recherche et de liens sponsorisés qui, jusqu'à maintenant, n'ont jamais réussi à "transformer l'essai" et l'espoir suscité lors de leur lancement.
- Jerry Yang, revenu aux affaires chez Yahoo!, n'a pas pu arrêter l'hémorragie en revenant à la tête de sa société... Et dire que Yahoo! utilisait, au début des années 2000, la technologie de Google sur son portail pour la recherche web, donnant ainsi une aura et une dimension révée à son concurrent, renommée dont il profitera allégrement par la suite. La plus grosse erreur stratégique de Yahoo! se situe certainement à ce niveau. Mais, à sa décharge, qui pouvait prédire, à ce moment-là, ce qu'allait devenir Google, à une époque où le moindre moteur de recherche était un centre de coûts parfois abyssaux ?
- Pour Microsoft, l'avantage de ce rachat serait évident. Au niveau du "search", il représente 2,9% du trafic mondial. Le rachat de Yahoo!, qui en traite 12,8%, le ferait passer à 15,7%, ce qui est loin d'être négigeable...
Bien sur, cette transaction laisse encore de nombreuses questions sans réponse :
- On le sait maintenant, Yahoo! a rejeté l'offre de Microsoft, ne désirant pas discuter à moins de 40 $ par action. Mais a-t-il même les moyens de refuser une offre intermédiaire, aux alentours de 35 $ ? Il y a fort à parier que les actionnaires de Yahoo! accepteraient une telle offre, certainement contre l'avis de Jerry Yang. Mais le poids de ce dernier est-il suffisant ? Le refus des 31 $ par action était-il juste une façon de faire monter les enchères ?
- Si la fusion se fait, comment vont cohabiter deux entreprises qui, c'est le moins que l'on puisse dire, ne s'apprécient que moyennement ? L'intégration des deux entités va-t-elle pouvoir se faire simplement ? Pas sûr, les deux cultures d'entreprises de Yahoo! et de Microsoft étant très éloignées l'une de l'autre. De plus, Yahoo!détient de nombreux sites (Flickr, Del.icio.us, etc.) qu'il va également falloir intégrer dans le "pot commun", ce qui va certainement se faire au chausse-pied...
- Ce nouvau duo suffirait-il pour contrer Google, qui détient également dans sa manche un conjoint du nom de YouTube, leader mondial de la recherche de vidéos ? A mon avis, non. Ni Yahoo!, ni Microsoft n'ont pu contrer Google de façon isolée. Difficile de penser que leur "famille recomposée" va pouvoir le faire, à moins d'avoir d'autres armes à leur disposition...
- Quelles technologies de recherche vont-elles être utilisées ? On se retrouve dans la même configuration que lorsque Yahoo!, propriétaire d'Inktomi, avait racheté Overture qui avait lui même acquis, quelques mois auparavant, AltaVista et AllTheWeb. Yahoo! et Microsoft ont toutes deux une technologie de recherche et une technologie de gestion des liens sponsorisés. L'une des deux va-t-elle être supprimée dans les deux cas ? Ou une fusion va-t-elle se mettre en place ? Difficile à dire pour l'instant même si, dans ce cas, la position de Yahoo!, présent depuis plus longtemps sur le marché, semble plus favorable... Dans tous les cas, les équipes qui gèrent ces services, chez Microsoft et chez Yahoo!, peuvent (hélas) se faire du mouron pour leur emploi dans les prochains mois...
Yahoo! a-t-il un "Plan B" possible ?
Si Yahoo! - et son board - refusent l'offre de Microsoft, comment peut-elle faire pour repartir d el'avant et conquérir de nouvelles parts de marché ? Il n'y a pas 300 000 solutions :
- Un rachat par Google. Impossible (Alexandre Diehl, avocat à la cour, explique dans la lettre "Recherche et Référencement" qui paraîtra le 15 février 2008 pourquoi cette transaction est impossible, en Europe notamment).
- Un partenariat avec Google : Yahoo! abandonne son outil de liens sponsorisés, voire sa technologie de recherche, et utilise ceux de Google tout en partageant les bénéfices. Avantage : Yahoo! garde son indépendance. Inconvénients : le marché perd un concurrent de Google et de nombreux emplois sont supprimés chez Yahoo!. De plus, Yahoo! devient fortement dépendant de Google et n'est donc pas si indépendant que ça en réalité... D'autre part, les autorités antitrust, aux Etats-Unis, accepterait-elles ce rapprochement ?
- Un rachat d'AOL par Yahoo!. Possible et en discussion, selon certaines rumeurs. Mais cela peut-il suffire pour redresser Yahoo! ? Rien n'est moins sûr. Et AOL, qui serait "à vendre", risque également de coûter cher...
- Un Rachat de Yahoo! par une autre structure. Eventuellement. Mais laquelle ?
- Pas de changements, de la continuité. Yahoo! ne change rien et tente de s'en sortir avec se s"forces vives" en interne ou à la faveur d'un (nième) changement de direction. Là encore, cela sera-t-il suffisant ?
Mais, surtout, selon moi, la question principale est celle-ci : De qui peut venir une réelle concurrence pour Google ? A mon avis, il n'existe qu'une seule alternative possible : une start-up débarque en 2008 avec une idée géniale (comparable au PageRank de 1998) et se fait racheter par un de ses concurrents (l'entité née de la fusion entre Microsoft et Yahoo! ?) avant de l'être par Google (ce qui condamnerait le marché de la concurrence). Une start-up ne peut plus rien aujourd'hui sur le marché du "search", demandant des investissements trop colossaux. A n'en pas douter, les nouveaux projets en cours comme Blekko, Cuill ou autres Wikia Search doivent actuellement se faire courtiser...
La proposition de Microsoft montre également qu'aujourd'hui, la vision qui fonctionne est clairement celle de Google, puiqu'elle lui a permis de distancer ses plus proches challengers. Le métier de Google est de mettre en place le meilleur moteur de recherche possible, et la publicité est un moyen pour y arriver. Force est de constater que la stratégie inverse (le but est de gagner de l'argent via la publicité, et le moteur de recherche est un moyen d'y arriver), ne fonctionne pas aujourd'hui. Yahoo! et Microsoft, pourtant deux géants de l'informatique et du Web, s'y sont cassé les dents...
Source de limage : Visual Media
À tous les problèmes de cohabitation évoqués s’ajoute celui de la technologie côté serveur employée. En effet, la quasi totalité de Yahoo! a migré vers PHP (n’oublions pas que, parmi son personnel, figure Rasmus Lerdorf, l’inventeur de PHP), tandis que Microsoft utilise sa propre technologie côté serveur pour Live Search.
Et les autres métiers?
Je sais bien que c’est ici un blog de recherche et référencement, mais on parle d’entreprises qui ont d’autres atouts: pour moi Yahoo c’était un annuaire et un portail; la « lutte » mal organisée contre la montée du concurrent moteur qui gagnait de l’argent avec sa pub a été de faire payer l’annuaire et d’acheter Overture pour faire pareil, et de mettre de la pub sur le portail….
Donc en luttant avec les armes de l’adversaire qui surfait sur une interface efficace et intuitive portée par une efficacité incontestable, Yahoo a perdu sa spécificité.
Or il reste des métiers à explorer: un bon annuaire de sites (Dmoz vivote et reste inconnu du grand public), un annuaire d’adresses email (légal, efficace, volontaire, avec opt-in et opt-out par catégories, intégrant des fonctions de réseaux sociaux, avec différents niveaux jusqu’au Who’s who du web), un portail sympa et indispensable: NetVibes manque de moyens et de notoriétés, les gadgets Google sont peu utilisés. Sur tout cela Yahoo a été en avance et ne l’est plus.
Google a une stratégie et une « mission » comme disent les américains, Yahoo et MS n’auraient-ils que la stratégie de l’imitation?
La principale difficulté est peut-être que Google est maintenant une marque ancrée dans l’esprit grand public, comme Coca, MacDo ou Chanel, c’est un autre élément en plus des investissements en architecture et logiciels qui limite la concurrence.
Un Rachat de Yahoo! par une autre structure. Éventuellement. Mais laquelle ?
– Disnay, c’est ce que j’ai pu lire dans la tribune d’hier. Pourquoi Disney? Je ne sais pas. Et ne voie pas l’intérêt d’un rachat par ce spécialiste du divertissement