Depuis plusieurs semaines, de nombreux outils de recherche basés sur le phénomène du "social search", autrement appelé "Web 2.0" sont sortis des cartons sur le marché francophone. Citons notamment Yoono, Yahoo! MonWeb, Lycos IQ, Yahoo! Questions Réponses, et ce lundi Wikio, moteur de recherche collaboratif sur l'actualité. Il y en a bien d'autres... Tous sont basés sur l'idée que la "communauté" aide, par sa participation et ses votes, à l'amélioration des résultats et du service rendu, méritant ainsi le nom de "folksonomie" (folks signifie "amis", "personnes" en anglais). Même Google s'y est mis, un peu plus tard que les autres, avec son outil Google Co-op, pas encore francisé...
En parcourant ces sites et en les testant, j'ai été finalement assez surpris de leur dénominateur commun : sauf erreur de ma part, aucun d'entre eux ne semble afficher de modèle économique. Pas de publicité, pas de lien sponsorisé, pas de zone "premium" payante, pas de numéros surtaxé à appeler pour obtenir un mot de passe, rien. Alors, que se passe-t-il ? Serait-il impossible de mettre en ligne un outil de recherche "social" sur le Web associé à une quelconque idée de rentabilisation ? Le seul modèle économique serait-il de se faire racheter par un "plus gros", une fois l'outil "sur les rails" ? Difficile de le croire...
Bien sûr, le business model le plus évident pour ce type de service est le lien sponsorisé, contextuel ou sur le "search". Mais est-il bien adapté à la notion de "communauté" ? C'est loin d'être sûr car les membres d'une même communauté ont le plus souvent une aversion envers un quelconque mode de publicité, aussi peu intrusive soit-elle... Certaines personnes m'ont signalé qu'un autre modèle possible était la vente ou la location de fichiers de prospects qualifiés une fois que les internautes se sont inscrits et ont un "vécu" dans leur communauté. Je suis très sceptique... Franchement, un site web qui ferait cela a-t-il un avenir sur le Web, qu'il soit en version 2.0 ou supérieure ? Là encore, la notion de "communauté" ne me semble pas en adéquation avec ce type de pratique...
D'ailleurs, lorsqu'on en parle aux propriétaires de ces sites, ils avouent encore leurs questionnements à ce sujet. Olivier Parriche, responsable "search" chez Yahoo! France, me disait récemment (dans la lettre "Recherche & Référencement" du mois de juin 2006) à propos de Yahoo! Questions / Réponses : "Nous ne désirons pas aller trop vite dans ce domaine. De manière assez intuitive, associer des liens sponsorisés avec les résultats de recherche dans la base de connaissance est la première voie envisagée sur la liste des options. Les modèles classiques que l'on trouve dans nos autres rubriques sont applicables ici aussi, mais nous faisons très attention à ne pas être intrusif. Nous ne nous précipiterons pas. L'objectif actuel est d'amener le produit au cercle vertueux, c'est-à-dire le point où la qualité des contenus génère l'assiduité des utilisateurs qui génèrent eux-même le contenu de qualité." De même, l'un des concepteurs de Wikio, récemment contacté, nous disait : "Le modèle économique reposera uniquement sur des liens sponsorisés. Mais notre priorité est actuellement d?offrir un service de qualité, puis de bâtir une audience, ceux-ci n?apparaîtront donc que dans quelques mois si nous remplissons ces deux objectifs."
Dans les deux cas, les liens sponsorisés sont envisagés, mais sans aller trop vite... Encore une fois, tout le monde marche sur des oeufs et attend de "prendre le pouls" de la communauté avant d'envisager un quelconque système de rémunération. Finalement il ne semble pas si facile que cela de rentabiliser une activité et un outil en ligne dès lors que l'on prend en compte cette notion de "communauté". Car celle-ci peut vite se retourner contre ses concepteurs si elle se sent flouée. Mais n'est-ce pas là également l'une des grandes forces de l'Internet ? En même temps, cela ne risque-t-il pas de sérieusement limiter l'essor des services de ce type ? C'est certainement ce que l'avenir nous dira...
Bonjour Salah (et tout le monde d’ailleurs),
Effectivement tu me faisais la remarque il y a quelques temps (dans un avion je crois ;o)), sur le Business Model de sites 2.0, comme Netvibes. J’avais parié sur les liens sponsorisés, ce que semble vouloir proposé Wikio dans quelques temps. En revanche, Pierre Chappaz précisait lors du forum Web 2.0 qui a eu lieu au Pré Catelan le 13 juin que Netvibes proposerait bientôt la possibilité pour des grands portails d’être présent dans la liste des flux de contenus présent par défaut à gauche. Pierre Chappaz précisait également que cet élément n’était pas définitif, les plans de Netvibes restant confidentiels…
Mais cela nous donne quand même une idée intéressante… Peut être Netvibes proposera t’il aux portails la possibilité d’être affiché en fonction des contenus présent sur la page de l’internaute, don de ses intérêts….
A suivre, Netvibes à dépassé les 4 millions d’utilisateurs, attendons la barre des 10 ?!.
David
un petit complément :
En effet le modèle économique des sites/moteurs créés autour du Web 2.0 reste opaque, je me suis demandé cette même question sur un post de David il y a quelque temps.
Je ne sais pas comment on pourrait monetariser ces services si on n’utilise pas les méthodes actuelles : Publicité contextuelle, comportementale, fichiers, abonnement? !
Je crois que, s’ils souhaitent garder leur gratuité, ce genre de services devraient se développer dans un cadre » communautaire » pour assurer leur survie.
Des développeurs passionnés qui apportent chacun une petite pierre à l’édifice, c’est le seul moyen à mon avis qui permettrait de garder ces services gratuits et permanents.
Souvenir : Modèle économique basé uniquement sur la publicité.
Vu comme c’est parti, j’ai bien peur que nous soyons en plein dans la bulle 2.0.
Le WEB 2.0 ou Social WEB selon Yahoo permet de créer des liens dans une communauté. Cela n’est pas contradictoire avec les services verticaux. Il s’agit juste d’étoffer des services déjà existants. Je vois 2 axes pour les majors :
– Dynamiser des activités cross-services dans leur portfolio : exemple tout simple, en IM vous voyez sur les Buddies les dernières recherches réalisées par les autres…etc..
– Valeur d’anti-churn.
Pour moi, le service communautaire n’existe pas en soit c’est juste une manière à un moment donnée de croiser les infos et de les valoriser auprès des utilisateurs. Notre comportement communautaire [on pourrait dire aussi de consommateur, ou tribal] est tellement intuitif que devoir aujourd’hui s’identifier à une communauté me semble quelque chose d’extrément rigide.
J’adhère plus à la notion de « SpyYourself » intelligente ou l’on met à disposition des autres internautes son patrimoine numérique [logs, avis, recherches] pour créer des interractions enrichies sur des services déjà identifiés mais pas forcément communautaire.
Merci pour tes articles qui me font rebondir, réfléchir, rebondir ..
Gourou.
Bonjour,
En rapport avec l’argument traité, il y a sur Many2Many un billet intéressant, en anglais, sur le coût par influence.
J-M
Et si le modèle économique des communautés reposait sur l’abonnement à terme?
Un moteur de recherche suffisamment intelligent pour me proposer une revue de presse des articles que je recherche pour l’instant à la main dans les flux RSS des sites que je connais ça pourrait justifier un paiement (et ça serait sans doute moins cher que l’abonnement à Libé ou LeMonde). Wikio est un bon exemple de ce genre, mais le lien sponsorisé entre en concurrence avec celui des sources: wikio est un index, le lien sponsorisé n’est-il pas plus efficace sur ces sources elles-mêmes?
La même interrogation se pose pour les sites d’experts: quel intérêt pour les experts à répondre gratuitement (ou pour la gloire) à des questions pointues?
Le seul exemple que j’ai vu fonctionner correctement est proz.com pour les traducteurs: en répondant aux questions de ses collègues, le spécialiste peut se forger une réputation et démontrer sa maîtrise de certains domaines, ce qui lui permet d’obtenir des contrats et donc de rentabiliser son abonnement au site qui lui permet d’avoir une présence bien indexée sur le web sur une place de marché fréquentée par ses clients potentiels.
Mais sur yahoo answers quel est l’intérêt économique des experts qui répondent?
A la fin des annees 90, lorsque Free a demarre, le principal n’etait pas de monetiser mais de prendre position et developper l’audience … puis est venue la Freebox … et le succes financier que l’on connait aujourd’hui ….
Le 2.0 est monetisable bcp plus rapidement … cf Basecamp (pour l’exemple) qui vend l’usage de sa plateforme mais aussi myspace pour le super exemple qui s’est vendu et qui monetise aujourd’hui une audience colossale.
Je crois que le web communautaire est parfaitement monetisable aussi rapidement que les operateurs prendront conscience de la proximité qu’ils peuvent développer avec leurs communautés a travers ces outils et des avantages que cela leur procure
Très bonne analyse. Merci Olivier.
Ceci dit, dans ce post, tu parles essentiellement des pointures du web 2.0. Celles-ci ont les moyens de lancer des projets d’envergure sans penser rentabilité à court terme.
Maintenant je pense aussi que l’une des caractéristiques de la plupart des projets/services web 2.0 est le coût de setup ridiculement faible (1 ou 2 cerveaux, 1 ordi, 1 serveur, qq euros et pas mal d’énergie suffisent au départ).
C’est la magie de la wave 2.0 (2ème vague des pionniers du web), des projets montés par des professionnels (fini l’amateurisme des débuts du web) avec des idées innovantes et des objectifs axés sur la qualité du service plus que sur la rentabilité court-terme. Ces nouveaux pionniers semblent avoir tiré les bons enseignements de la 1ère vague/bulle : « la qualité et rien que la qualité. On verra après pour la rentabilité, de toute façon on a pas levé 2 miliions ?. Au pire, on aura perdu du temps »